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Droit en ligne

 

Covid 19 et Covid longue : jugements d’intérêt pour les travailleurs.euses ayant contracté le virus à l’occasion de leur travail

Charbonneau et Centre de service scolaire des Samares, 2023 QCTAT 219

Dans cette affaire, un avocat de notre étude a représenté avec succès une enseignante dont la réclamation à la CNESST dans laquelle elle soutenait avoir contracté la Covid 19 à l’occasion de son travail a été rejetée. Dans un jugement daté du 16 janvier 2023, le Tribunal administratif du travail (ci-après «TAT») conclut que la travailleuse a subi une lésion professionnelle.   

Alors que la travailleuse fait valoir que la Covid 19 est une maladie professionnelle, en ce sens qu’elle est reliée directement aux risques particuliers de son travail, le TAT retient que son fardeau est de démontrer que l’infection a été contractée, de manière plus probable, dans le milieu de travail plutôt qu’ailleurs.

En l’espèce, selon le TAT, la preuve établit notamment que la travailleuse dînait dans un local fermé avec des personnes ayant contracté le virus avant elle, mais dans une période concomitante, qu’elle a côtoyé régulièrement le concierge qui a contracté le virus avant elle, qu’elle a passé plusieurs heures dans un local avec la secrétaire qui a testé comme atteinte du virus quelque jours après cette rencontre et que la travailleuse a été infectée, mais qu’aucun membre de sa famille ne l’a été. Considérant ces faits, le tribunal conclut qu’il est beaucoup plus probable qu’elle ait été infectée sur les lieux de son travail qu’à tout autre endroit.

Considérant cette conclusion, l’infection à la Covid 19 est liée au risque particulier de son travail. Le TAT accueille la contestation et déclare que l’enseignante a droit aux prestations prévues à la loi.

Cette décision réitère donc les critères retenus par la jurisprudence depuis le début de la pandémie de la Covid 19 afin de déterminer si l’infection constitue ou non une lésion professionnelle.

Dionne et Jardins du Haut Saint-Laurent (1992) inc., 2022 QCTAT 5728

Dans cette affaire, le TAT reconnaît que l’affection post-Covid 19 de la travailleuse ayant contracté le virus au travail constitue une récidive, rechute ou aggravation. 

Pour comprendre la décision, il importe de se pencher sur l’historique du dossier.  La CNESST a reconnu que la travailleuse ayant contracté la Covid 19 le 22 mai 2020, à l’occasion de son travail, avait subi une lésion professionnelle, laquelle était consolidée sans séquelles en septembre 2020. Le 19 février 2021, suivant l’émergence de symptômes attribuables, selon le professionnel de la santé en charge, à une affection post-Covid 19 (Covid longue), la travailleuse doit cesser de travailler. Elle présente une réclamation pour faire reconnaître une récidive, rechute ou aggravation de la lésion subie le 22 mai 2020. Cette réclamation est refusée.

Le Tribunal retient que la médecin qui a charge de la travailleuse appuie son diagnostic sur des études présentées lors d’une formation destinée aux médecins omnipraticiens. Le Tribunal tient compte de la définition de l’affection post-Covid 19 retenue par l’Organisation mondiale de la santé et présentée dans le cadre de cette formation. Le Tribunal convient que le cas de la travailleuse répond à cette définition.

Le Tribunal fait en outre état de la jurisprudence récente dans laquelle le TAT retient que la manifestation ou la recrudescence de symptômes plus de trois mois après l’infection initiale peut constituer une récidive, rechute ou aggravation même sans séquelles.

Tenant compte des études récentes sur le sujet, le Tribunal retient que l’affection post-Covid peut se manifester tant dans les cas où l’infection a été symptomatique, asymptomatique, suffisamment grave pour occasionner une hospitalisation ou a été consolidée sans séquelles. Il conclut qu’il est inutile, en l’instance, de se questionner sur la continuité de la symptomatologie connue lors de l’infection initiale.

 De plus, le Tribunal affirme qu’il ne doit pas non plus s’attarder au fait qu’il y a eu ou non un retour au travail avec ou sans limitation fonctionnelle.

 Selon le Tribunal, en l’instance, le délai entre l’infection et la récidive, rechute ou aggravation et l’infection initiale, a toute son importance pour apprécier la causalité. Selon la littérature scientifique, les symptômes attribuables à l’affection post-Covid 19 se manifestent plus de trois mois après la phase symptomatique aiguë de l’infection initiale. Ce délai est en l’espèce largement dépassé.

 Le Tribunal conclut que la preuve établit un lien entre l’arrêt de travail de février 2021 et la lésion professionnelle subie en mai 2020.